Il faut s’y préparer. Vincent Peillon l’a annoncé.
Enfoncez-vous bien dans vos chaises.
Encore une fois, la France chute dans le classement international PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) qui sera publié mardi 3 décembre à midi.
PISA est le classement international de référence. Dès sa création en 2000, il défraie la chronique. Il faut dire qu’il s’attaque à quelque chose de stratégique pour une nation : évaluer les compétences des jeunes de 15 ans en lecture, en mathématiques et en sciences. Il faut environ un an pour dépouiller les résultats et les analyser.
Si vous tombez sur un tableau PISA, ne cherchez pas la France en haut du classement. Allez plutôt voir dans ceux qui sont à la traîne : en 2009, la France était 22e en lecture, 22e en mathématiques, et 27e en sciences.
Non seulement la France n’est pas bien placée... mais en plus elle ne cesse de chuter. L’Angleterre, l’Allemagne, la Pologne... toutes ces nations ont été réveillées par un “PISA-Choc”.
La France, elle, continue son profond sommeil.
Résultats PISA de 2009
La grande dégringolade pour Pisa 2012. Attendons-nous au pire.
Le ministre de l'Education Nationale Vincent Peillon s’est exprimé une première fois sur Canal+ sur la catastrophe que nous allons prendre de plein fouet : “Vous allez voir en décembre 2013 on va avoir les nouvelles études PISA 2012. La France décroche totalement dans les performances de ses élèves. [...] Sur dix ans, ça devient dramatique.”
Depuis, il ne rate pas une occasion de le répéter, chaque fois qu’il est l’invité des médias, il en profite pour glisser une alerte sur les résultats catastrophiques de PISA en 2012 (qui seront donc connus le mardi 3 décembre prochain):
Mais ne compare-t-on pas du Coca-Cola et du Champagne ?
Personnellement, j'ai toujours trouvé ces tests internationaux un peu bizarres, décalés.
Il me semble que pour les mathématiques en tout cas, les exercices auxquels nos élèves de 15 ans sont habitués depuis toujours sont très différents de ceux auxquels ils seront confrontés le jour de l'épreuve PISA.
Comme si, en équitation, on demandait à un jockey de faire un parcours de saut d'obstacles, ou l'inverse, sous prétexte qu'il s'agit de chevaux.
Ou comme si on demandait à Nadal de faire le championnat du monde de badmington car il est censé s'y connaître en raquettes.
Voici quelques exercices de maths de seconde (élèves de 15 ans), version système français:
Collection Hatier, Fonctions de référence, p143
Chaque exercice est structuré. On avance pas à pas. Les questions n'arrivent en général pas comme "un cheveu sur la soupe".
Voici maintenant quelques exercices PISA:
On le voit bien, cela n'a rien à voir. C'est pas mal, ça fait également travailler les neurones, c'est sympa, mais ça n'a rien à voir.
Une seule question qui arrive d'un coup, sans "prévenir". Et on passe à un autre exercice.
Comme dans les exercices Australiens par exemple (Elèves de Year 11, qui ont 15 ans eux aussi)
Site web ici:
Dix petits exercices différents contenant chacun une seule question.
Quand on regarde tout le site web en question, ainsi que d'autres du même type, on voit pas mal de ressemblances avec les exercices PISA. C'est déjà bien plus le même style que les nôtres.
Cela pourrait peut être expliquer en partie les mauvais résultats obtenus par les élèves français: ils ne sont pas habitués à ce genre d'exercices.
Une autre piste concerne également la part de redoublants dans le système français, contrairement aux autres pays. Les élèves redoublants n'étant pas plus motivés ni meilleurs lors de leur redoublement et s'ils ont 15 ans, ils peuvent faire le test PISA.
Il me semble également que les questions PISA iraient mieux à des élèves du collège (4e-3e) que ceux du lycée !
Mais sinon, pourquoi faudrait-il donc absolument s'aligner sur les autres pays?
Les élèves français simplement bons en maths passent souvent pour des génies ou surdoués lorsqu'ils vont aux USA ou ailleurs faire une partie de leurs études.
Ils ne sont pas forcément géniaux ou surdoués, mais ont tout simplement assimilé correctement la rigueur mathématique du système français.
Les classes préparatoires, les Grandes Ecoles d'Ingénieur (X, Centrale, Mines, Supelec,...), Normale Sup sont des brillants exemples d'un très bon niveau français en mathématiques.
Avec les USA, la France est d'ailleurs le pays le plus titré en terme de médailles Fields (équivalent du prix Nobel pour les maths, décernée tous les quatre ans)
Ci-contre: une médaille Fields
Tout récemment encore, la France n'a-t-elle pas ramené des médailles aux Olympiades Internationales de Mathématiques 2013 en Colombie:
Arthur Blanc-Renaudie et Nathanaël Courant, médailles d’argent avec 28 points chacun, à 3 points de la médaille d’or
Cyril Letrouit et Seginus Mowlavi, avec 23 points chacun, médailles de bronze, à 1 point de la médaille d’argent
Yassine Hamdi et Alexander Semenov, avec 17 points chacun, médailles de bronze également.
Cédric Villani, médaille Fields 2010
Les lauréats Fields: un français à chaque fois lors des cinq dernières éditions: 11 en tout.
En Europe: Allemagne: 1, Italie: 1, Belgique: 2, Grande-Bretagne: 5, Espagne: 0
Qu'il s'agit d'une "élite", qu'on met souvent entre guillemets comme pour un gros mot.
Qu'on se rassure, au rythme où les programmes (français) de mathématiques fondent comme peau de chagrin (comparer le bac scientifique 2013 de mathématiques de métropôle avec le bac scientifique 2013 Afrique qui contient deux sujets à faire sans calculatrice graphique ou programmable ! sujet 1 et sujet 2), cette élite là risquent vite de "rentrer dans le rang". Dommage.
Aujourd'hui, un très bon élève de terminale S qui aura choisi spécialité Physique ou SVT (mais pas Maths) pourra ainsi faire toute sa brillante scolarité et décrocher le bac S avec mention sans n'avoir jamais entendu parler de nombre premier ("Premiers entre eux ?" dira-t-il, Non non, juste premier).
Depuis quelques années, certains tirent la sonnette d'alarme sur le niveau en mathématiques. Les alertes les plus troublantes sont venues de responsables de grandes écoles d'ingénieurs, qui dressent le constat d'une diminution des compétences de leurs étudiants, pourtant issus des classes préparatoires scientifiques. Ce phénomène est également constaté par les entreprises qui recrutent leurs diplômés dans ces établissements.Pour Laurent Decreusefond, professeur de mathématiques à l'Ecole nationale supérieure des télécommunications (ENST), non seulement la baisse est"vérifiée", mais "on a encore passé un cap cette année". "Les élèves ne voient plus aujourd'hui en classes préparatoires certaines notions, pourtant utiles dans pratiquement tous les domaines scientifiques. Le niveau des ingénieurs français est traditionnellement basé sur une formation robuste en maths-physique. C'est un avantage que nous risquons désormais de perdre."Suite de l'article ici.Autre article ici:
http://lemonde-educ.blog.lemonde.fr/2011/06/21/les-grandes-ecoles-sinquietent-des-consequences-de-la-reforme-du-lycee/ou encore là:
Malheureusement, on va donc encore probablement sabrer quelques chapitres, et laisser de côté la rigueur habituelle de l'apprenti mathématicien, de façon à rentrer coûte que coûte dans le moule à Pisa.http://lemonde-educ.blog.lemonde.fr/2011/06/21/les-grandes-ecoles-sinquietent-des-consequences-de-la-reforme-du-lycee/
Et les résultats en français ?
Ce n'est pas mon domaine mais il suffit d'observer les messages des internautes sur les forums pour contempler l'étendue des dégâts en matière de grammaire et d'orthographe.
Et en tant que parent, j'ai souvent été surpris par la complexité de certaines leçons de français au collège:
Exemple: Comment construire le groupe prépositionnel ?
Réponse:
Le groupe prépositionnel peut être construit avec différents groupes syntaxiques qui sont ses expansions :groupe nominal (exemples 1 et 2), groupe infinitif (exemple 3), un groupe adverbial (exemple 4), pronom(exemple 5), groupe prépositionnel (exemple 6). Ces expansions suivent la préposition, noyau du groupe.
Par ailleurs, le groupe nominal peut être complété par un autre groupe nominal. Il est souvent introduit par une préposition . On l’appelle le groupe nominal prépositionnel (GNP)
Ah, tant mieux. Nous voilà rassurés.
Mais dans le même temps, il ne semble apparemment toujours pas très important d'insister sur le fait de mettre un s au pluriel, ou un x à chevaux, ou encore d'accorder correctement le participe passé (é ou er).
Des choses simples en apparence. Mais non, on préfère se focaliser et dégoûter les élèves sur le groupe prépositionnel et ses déclinaisons.
Même chose si aux excellents élèves de terminale L, on essaye de faire référence à Molière et au célèbre "Comme M. Jourdain, vous faites donc de la prose sans le savoir": un bide. Aucun élève ne connait. Même les très bons. C'est devenu hors sujet.
Qu'on se rassure, au vue des résultats PISA du 3 décembre 2013 prochain, pas mal d'experts dans les ministères de France et de Navarre vont probablement nous concocter une nouvelle réforme, tant en français qu'en maths.
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